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Je veux qu’elle décide

Je veux qu’elle décide

Un récit de séance permet d’apprécier le type de Codéveloppement pratiqué et la qualité d’une séance.

Le “client” de la séance est Frank, directeur d’un grand département dans une société d’assurance. Il encadre des managers de managers, dont Corinne en qui il a habituellement grande confiance.
Corinne encadre divers services dont celui de Patricia, manager de proximité, qui, elle, dirige une équipe de 15 techniciennes et employées. Corinne et Patricia se sont connues il y a 5 ans, elles étaient alors collègues managers.
(Structure : Frank >> Corinne >> Patricia >> une équipe opérationnelle)
Cette équipe de 15 a déjà manifesté son insatisfaction envers Patricia, de multiples façons, par des allusions indirectes notamment.
Cela ne surprend pas Corinne qui s’est rendu compte, depuis qu’elle-même est arrivée il y a un an et demi, que Patricia ne manage guère. Elle se concentre sur les dossiers difficiles et communique peu avec l’équipe. Elle ne joue pas le rôle attendu : entretiens et réunions, faire réfléchir et faire proposer, faire progresser avec de petits projets.
Cela ne gêne pas beaucoup le travail car l’équipe est très compétente. Cela gêne la communication, la conduite des évolutions, le suivi et la progression de chacun, l’amélioration continue.

Corinne a fait de nombreuses remarques. Elle est parfois entendue, et voit que des efforts sont faits par Patricia pendant quelques temps. Parfois aussi la communication s’améliore. Mais ça ne semble pas durer.
Le temps passant, Frank a invité Corinne à se positionner : Patricia peut-elle rester manager ? Ou faut-il trouver une autre solution ?
Corinne penche assez clairement pour une mobilité vers un poste d’expert. Elle en a parlé à Patricia … qui refuse tout net !
Corinne a aussi mis parfois de la pression pour que Patricia évolue dans son management. En Janvier Patricia s’est alors fâchée, très “rentre dedans”. Alors que, à un autre moment, après l’entretien d’évaluation de Mars, Patricia a eu un arrêt maladie de 15 jours.
Frank voit bien que la situation ne va pas pour l’équipe, il faut en sortir. Et son supérieur, Directeur des opérations, est bien d’accord et fait pression.
Demande de Frank en étape 3 de la séance de Codéveloppement (il s’agit d’une séance de découverte, isolée) :
“Je demande régulièrement depuis 8 mois à Corinne de prendre position, de décider concernant Patricia et de lui annoncer la nécessité d’un changement de métier. Rien ne bouge. Je ne veux pas intervenir directement car j’ai un grand principe de délégation pour ne pas déresponsabiliser. Ce n’est pas à moi de parler à Patricia.
Or Corinne n’avance pas, c’est incroyable, alors même qu’elle partage mon point de vue. Cela commence à m’irriter fortement. On fait du sur place. Je veux la faire décider.
Je voudrais vos éclairages sur cette situation”.

De nombreux apports sont faits en étape 4 pour voir comment faire bouger Corinne, faciliter son passage à l’action, des témoignages qui montrent comment mobiliser.
On va clairement dans le sens de l’objectif de Frank : pousser Corinne à décider, c’est à dire sortir Patricia du management. On parle même de “courage managérial”.
Cependant en seconde partie de l’étape 4 Franck commence à entendre d’autres sons de cloche. Des points de vue très différents :

  • On peut se demander si la situation, qui vous paraît claire à vous, Frank, n’est pas bien plus délicate pour Corinne. En effet :
  • Elles sont anciennes collègues, elle et Patricia …
  • L’équipe marche bien, la production est très bonne
  • Patricia fait des efforts çà et là qui fonctionnent, ce qui laisse penser qu’elle serait peut-être capable d’évoluer…. et le manager dans ce cas peut se demander si, lui, a su faire évoluer.
  • Patricia peut intimider fortement par ses colères dures
  • Patricia peut aussi inquiéter : son arrêt maladie après une confrontation peut laisser penser à une fragilité masquée…
  • La décision à annoncer pourrait peut-être provoquer des conséquences préoccupantes qui dépassent Corinne
  • Que Corinne ait beaucoup de mal à trancher n’est finalement peut-être pas du tout surprenant…

Frank a écouté, a pris des notes. En étape 5, il déclare :

  • Je n’avais pas vu les choses comme ça. Le fait de les lister ensemble, ça m’a … frappé. Vu comme ça je me rends compte que c’est très délicat et coinçant pour Corinne
  • Les risques peuvent aussi dépasser son champ de décision en effet
  • Je me rends compte que je n’ai pas su lui demander “Qu’est ce qui te freine ?” et lui laisser le temps d’expliquer
  • Mon style “battant” n’a pas aidé
  • Je vois que j’ai une vision trop extrême de la délégation. Je viens de comprendre ce qu’on appelle “épauler” ou “accompagner”. Merci à tous
  • D’autres participants ajoutent : “Moi aussi je me serais irrité. Je découvre une autre façon de voir une situation. Et qu’il a fallu du temps pour ça”.

Nos commentaires :

Une séance de 3h a été nécessaire pour y voir clair
On n’a pas poussé le client vers des solutions, on a éclairé la situation
On n’a pas poussé le client à atteindre son objectif. Il a découvert que son objectif était contre-productif. Ce n’était pas une question de courage managérial mais de faisabilité et de zone de responsabilité
On s’est intéressé à la stratégie du client en lien avec les éléments de contexte (le regard systémique).
Tous font des apprentissages
L’animateur ajoutera un commentaire théorique sur “Ce qui n’est pas délégable”, enrichi par les réflexions et expériences des participants

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